L’intervention de Célia Massard, régisseuse des œuvres à l’Écomusée de la Bintinais, a offert à la promotion MAGEMI 17 l’occasion de découvrir les multiples facettes de son métier et la diversité des missions qui le composent. La formation s’est articulée autour d’une séance théorique à l’université et de trois séances in situ. Deux d’entre elles se sont tenues dans les réserves du musée de Bretagne, d’abord au Champs Libres puis à la Plaine de Baud ; la dernière s’est constituée en atelier consacré au conditionnement des œuvres à l’Écomusée de la Bintinais. Retour sur ce cycle de rencontres et les enseignements retenus !

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Visite des réserves

La promotion MAGEMI 17 a eu la chance de visiter les réserves mutualisées de l’Écomusée et du musée de Bretagne, le 24 octobre 2025. Les collections de ces deux institutions sont en effet conservées dans un même espace. Ces réserves, structurées par médium, s’organisent en cinq catégories : textile, orfèvrerie et numismatique, peinture, arts graphiques, négatifs photographiques. Au cours de cette visite, nous avons pu observer les rayonnages modernes des réserves et approfondir nos connaissances en conservation préventive. Cette rencontre a pris la forme d’un véritable cours in situ, nous permettant d’aborder en détail les mesures de conservation appliquées notamment aux textiles, ainsi que de prendre connaissance des matériaux utilisés, comme le Tyvek ou les pochettes en polyéthylène. Nous avons également découvert les protocoles de conservation des coiffes et, plus précisément, l’importance de leur nettoyage et du retrait de l’amidon. Célia Massard nous a expliqué que ces objets étaient souvent conservés montés afin d’en préserver la mémoire et la forme d’origine. Le plan de sauvegarde des œuvres a également fait l’objet d’une discussion, la régisseuse insistant sur les mesures d’urgence prévues dans la réserve des négatifs photographiques, où les collections peuvent se révéler particulièrement vulnérables en cas de sinistre.

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Une autre visite a eu lieu au Centre de Conservation Auguste André (Plaine de Baud) où les réserves sont installées depuis 1996. Les bâtiments, initialement occupés par une imprimerie, ont fait l’objet d’importants travaux d’aménagement afin de garantir des conditions conformes aux exigences de la conservation muséale. Cependant, ces espaces sont aujourd’hui entièrement saturés. Par conséquent, l’Écomusée de la Bintinais et le musée de Bretagne prévoient de transférer leurs collections vers de nouveaux locaux, laissant le bâtiment à la disposition du musée des beaux-arts de Rennes.

Les réserves du Centre s’organisent, elles aussi, par médium ou typologie de collections : les gros volumes, le mobilier, le lapidaire, l’archéologie et les collections relatives à la vie professionnelle et domestique forment chacune une section. Cette visite nous a permis d’observer les méthodes de rangement et de gestion des collections, notamment dans le cadre du chantier des collections actuellement en cours. Chaque caisse et chaque palette fait l’objet d’une identification précise, comportant un nom et une indication de poids, garantissant ainsi une traçabilité rigoureuse des objets.

Quelques œuvres du docteur Louis Auzoux, en dépôt de l’Institut Agro Rennes-Angers, étaient également présentes en réserves. Nous avons ainsi pu découvrir ce que nous n’avions pas encore vu de la collection, ce qui bénéficiera incontestablement à notre sélection d’expôts !

Pour finir, et afin de compléter notre initiation à la conservation préventive, Célia Massard nous a présenté les traitements mis en œuvre en cas d’infestation entomologique. Elle a notamment détaillé les procédés d’anoxie statique et dynamique, ainsi que les traitements par congélation et par chaleur, illustrés par des exemples concrets d’objets et de protocoles appliqués.

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Conditionnement

Pour la dernière séance in situ, le 4 novembre 2025, la promotion MAGEMI s’est rendue à l’Écomusée de la Bintinais dans le cadre d’un atelier pratique consacré au conditionnement.

Le conditionnement des œuvres constitue une étape essentielle pour garantir leur conservation et leur sécurité pendant les manipulations ou le transport. Il repose sur l’utilisation de matériaux à pH neutre afin d’éviter toute réaction chimique, bien que l’usage d’éléments issus du pétrole comme le Tyvek soulèvent aujourd’hui de nombreuses questions. La recherche actuelle ambitionne de développer des alternatives durables, mais ses avancées demeurent modestes.

Certaines catégories d’œuvres comme les pastels ou les dessins pulvérulent : elles nécessitent donc des précautions particulières, dont l’usage de pochettes en papier neutre et de maries-louises pour éviter l’étalement des pigments. Lors du transport, les œuvres doivent être positionnées dans la longueur, ce qui permet d’éviter les translations horizontales et verticales trop importantes au cours du déplacement.

Le conditionnement doit être conçu en trois étapes pour réduire les manipulations directes et garantir la sécurité de l’objet à chaque phase. Lorsqu’il est impossible de le réaliser sur mesure, une solution de tamponnage peut être envisagée : le tableau est alors enveloppé dans du Tyvek, enroulé dans du papier bulle pour amortir les chocs, puis calé à l’aide de planches de carton.

Enfin, le respect du code de déontologie de la conservation-restauration demeure fondamental : la manipulation et le conditionnement doivent toujours être réalisés en collaboration avec des professionnel·les qualifié·es, afin d’assurer la préservation optimale des œuvres.

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La séance a, dans un dernier temps, pris une dimension plus pratique en même temps qu’intime. En effet, chaque étudiante était invitée à apporter un objet personnel, choisi pour sa valeur symbolique ou sa particularité matérielle, afin de servir de support concret à l’expérimentation des techniques de conditionnement. Cet exercice visait à confronter les principes de conservation préventive à des cas réels, en tenant compte des singularités de chaque matériau et des contraintes de manipulation.

Lors d’un atelier d’environ deux heures, chacune d’entre nous a procédé au conditionnement de son objet, en appliquant avec rigueur les méthodes et précautions présentées en amont par Célia Massard : choix de matériaux neutres, ajustement des calages liés à des réflexions sur le stockage ou le transport. Cette mise en pratique a permis de mesurer concrètement les enjeux du travail de régisseur·euse où chaque geste doit concilier protection, stabilité et réversibilité. Elle a également offert l’occasion de lier la théorie à l’expérience tangible, favorisant une meilleure compréhension des enjeux techniques, matériels et éthiques liés à la conservation des œuvres et objets de collection.

Pour clôturer ce cycle d’interventions, Célia Massard est intervenue le 7 novembre 2025 à l’université afin d’aborder par un cours théorique la régie des prêts, à travers l’emprunt des collections. Elle nous a présenté les différentes étapes du processus – de la recherche des œuvres à leur restitution, incluant la sélection auprès d’institutions ou de collectionneurs –, ainsi que la gestion des prêts à travers les bases de données et la rédaction de contrats précisant conditions, assurances et transports. Elle a également souligné l’importance de la logistique et du respect des normes de conservation pour assurer la protection et la traçabilité des œuvres prêtées.

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Cette rencontre nous a permis de développer des compétences techniques et méthodologiques liées à la conservation préventive : choix de matériaux adaptés, manipulation sécurisée des œuvres, préparation du transport et gestion des réserves. Cette expérience a renforcé notre rigueur, notre sens de l’observation et la compréhension du rôle de la régie dans la préservation des collections.

Marilou Flotat et Émilie Vezian